Académie pâtisserie: le macaron dans tous ses états
- Publié le 19 décembre 2014
- Par Laurent
- Dans Du côté de chez Mmmmh!
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Deuxième samedi après-midi passé chez Mmmmh! dans le cadre de l'Académie Pâtisserie. Après les petits biscuits, on s'est attaqués à ce qui constitue sans doute LE challenge du pâtissier débutant: le macaron. Mais si l'aventure est risquée, le jeu en vaut la chandelle: quoi de plus classe que de débarquer à un dîner en amenant des macarons et, à la traditionnelle question "ils viennent d'où ?", répondre négligemment "oh, ils sont fait maison..." ? C'est comme les réunions de l'ambassadeur ou le riz de l'oncle Ben: toujours un succès.
L'histoire du macaron est riche. Tellement que je ne serais pas surpris de voir HBO en tirer une série un de ces jours: les plus puissants pâtissiers du royaume seraient prêts à toutes les trahisons pour obtenir LA recette du macaron, détenue par l'intendant de la couronne, tandis que d'accortes pâtissières peu vêtues s'adonneraient à la préparation du biscuit dans un nuage de farine et une avalanche de meringue.
Mais je m'égare.
Importé en France - depuis l'Italie - par Catherine de Médicis, le macaron partage une étymologie commune avec un potage médiéval épicé à la canelle et au safran. Les noms des deux recettes ne divergeront qu'à partir du 17ème siècle: pour tous les écrits rédigés avant cette époque, il est donc difficile de savoir à quelle préparation on fait référence. De déclinaisons linguistiques en variations culinaires, cette autre recette finira d'ailleurs par donner les macaronis, qui n'ont qu'un lointain rapport avec la pâtisserie qui nous occupe ici, vous en conviendrez (et sinon, je suis curieux de venir manger chez vous à l'occasion). Initialement, le macaron consistait en une unique coque, non garnie, et la forme la plus consommée aujourd'hui n'a plus grand chose à voir avec le macaron historique. Pour la petite histoire, sachez que c'est un descendant de Louis-Ernest Ladurée, fondateur de la célèbre chaîne française, qui eut l'idée d’accoler deux coques et de les garnir. Si cette forme est la plus célèbre, il existe encore aujourd'hui d'innombrables variantes, selon les régions et selon les goûts: le macaron se décline à la crème, à la ganache, à la confiture, aux épices, à la liqueur, voire en version salée, au foie gras ou à la mousse de saumon. L'imagination du pâtissier est finalement la seule limite.
C'est peut-être une des raisons pour lesquelles le macaron a connu un regain de popularité il y a quelques années: effet de mode oblige, c'est aujourd'hui devenu un incontournable, et de Léonidas à Wittamer en passant par Pierre Marcolini et même McDonald's, il est désormais rare de trouver une enseigne dont il ne fasse pas partie de la gamme, avec, faut bien le dire, des fortunes (et des tarifs !) variables. Parce que comme pour tout ce que touche l'industrie, le macaron a largement perdu son caractère artisanal et se fabrique désormais à la chaîne: c'est sans surprise mais néanmoins dommage, et c'est en tout cas une excellente excuse pour s'attaquer à ce monument de la pâtisserie. Bref, sus ! Mise en garde préliminaire: l'ennemi est coriace, et sa complexité est à la hauteur de sa réputation. Mise en garde préliminaire bis: disposer d'un robot pâtissier - type KitchenAid ou Kenwood - permet de singulièrement se faciliter la vie.
Première étape: préparer la pâte qui va servir à réaliser les coques. La base est constituée de poudre d'amandes, de sucre et de blancs d’œufs. Petit truc du chef, c'est de travailler les blancs d'oeuf à température ambiante. On les bat jusqu'à obtenir une consistance qui donne des becs d'oiseau. C'est une image, vous l'aurez compris; hein oui ? Un peu de colorant et hop, c'est dans la poche (à douille).
Oui dis comme ça, ça l'air simple, et en voyant le chef opérer aussi. Étrangement, les choses se gâtent un peu quand il s'agit de s'y mettre soi-même: la préparation est fragile, la moindre erreur dans le dosage peut tout faire foirer. C'est d'ailleurs ce qui arriva, puisqu'à la deuxième répétition de la recette par nos petites mimines, la pâte que l'on a sorti du robot avait vraiment une drôle de tronche. Pourtant, tout le monde était persuadé d'avoir respecté la recette à la lettre et du coup, tout le monde insista pour quand même poursuivre avec cette préparation. Evidemment, le résultat fut sans appel: plantage total, ce qu'on a sorti du four aurait pu passer pour une oeuvre d'art contemporain ayant pour titre "Fukushima mon amour". Ceci dit, c'est aussi un des atouts de l'académie: expérimenter par soi-même, et découvrir les erreurs à ne pas faire; en l’occurrence, le temps perdu à tenter de cuire la pâte ratée dépassait de loin le temps que nous aurions pris à directement en refaire.
En parallèle, on s'occupe des garnitures (assez simples pour le coup): crème pâtissière et framboises fraîches d'une part, caramel au beurre salé d'autre part. Pour celui-ci, Sergio nous livre deux astuces fort utile: d'une part, toujours mouiller le sucre - ce qui permet une montée en température plus homogène - et surtout, une fois que ça commence à chauffer: pas touche ! On peut éventuellement remuer la poêle pour que la chaleur circule, mais on n'y plonge aucun ustensile, sous peine de se retrouver avec de gros cristaux de sucre pas franchement sexy et impossibles à éliminer.
Retour aux coques: une fois une pâte digne de ce nom obtenue, il faut, à l'aide d'une poche à douille, la déposer régulièrement sur une feuille de papier cuisson. Là aussi, précision et rigueur sont de mise, à tel point que l'utilisation d'un gabarit - et un coup de pouce du chef - s'avèrent nécessaires. Au final, on parvient à apprêter quelques belles plaques que l'on peut enfourner. La cuisson nous confirme encore à quel point il s'agit d'une préparation fragile: deux fours réglés identiquement nous ont donné dans un cas des macarons très réussis, dans l'autre, des coques dont un tiers était craquelées. Ça reste évidemment mangeable, mais un des atouts du macaron réussi réside dans son apparence, donc bon... Pour éviter cela, il n'y a pas 36.000 options: connaître son matériel sur le bout des doigts et procéder par essai / erreur. On termine par les amaretti, qui sont une variation plus simple du macaron, et d'ailleurs plus proches du macaron historique.
Bilan de la journée: quelques belles fournées de macarons au caramel au beurre salé assez bien réussis, et pour chacun, un gros macaron aux framboises et à la crème.
Le soir même, j'étais dans les coulisses d'un théâtre bruxellois où j'offrais mon trophée aux comédiens et aux techniciens. Verdict: "ça tue, tu reviens quand tu veux". Quand je vous disais que le succès était assuré. ;)
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